Parc du Langtang
Et la Caval passe les 8000 m ...
Non non, malgré ce sous-titre accrocheur, nous n'avons malheureusement pas posé le pied sur l'un des quatorze 8000 m de notre planète (Ou plutôt des 8, car "seuls" 8 sommets de plus de 8000 m sont au Népal.) ... Nous nous sommes contentés d'une belle rando de 2 semaines, qui au long de ses 190 km nous a fait grimper quelques 8100 m de dénivelé (Cumulé) avec un col à 4610 m et un maximum de 4900 m lors d'une "course" à la journée.
Mais tout commence un sale matin dans les rues de Katmandou ... Il est 6H00 du mat' et déjà nos poils de nez se chargent de la fine poussière que soulèvent les voitures. Nous arrivons alors au terminal de bus qui nous a, la veille, laissé coi ! Prévoyez une bonne heure d'avance pour y trouver le bus à bonne destination si vous devez en passer par là. Mais ce matin nous sommes mieux informés et nous voici sur le bon trottoir à attendre notre heure. Nos heures devrais je dire car il en faut pas moins de 10 pour rejoindre Syaphru Besi, quelques 120 km plus au nord ! On aurait pas fait pire en vélo !!!
Un premier dal bhat (Plat traditionnel népalais composé essentiellement de lentilles en soupe (dal) et de riz (bhat) agrémenté aussi de quelques légumes préparés au curry mais rarement de viande. Ici dans l'un des pays les plus pauvres du monde (Bottom 10) la viande coûte chère, très chère. Alors on en mange peu et nous nous commençons notre quinzaine végétarienne.), une bonne nuit en hôtel et un réveil réglé à 5H00 (Faut dire qu'à 19H00 nous sommes au lit.) sont notre lot pour attaquer notre première journée en montagne ...
Le soleil n'est pas levé lorsque les cailloux crissent sous nos semelles ... Les sensations d'un temps passé me reviennent ... J'avais alors 25 ans et je découvrais les joies de la randonnée, le décors s'appelait Chartreuse, Vercors, Belledonne ou aiguilles Rousses puis plus tard massif du Mont Blanc, Mont Joly, aiguilles Rouges ou aiguilles Varan ... Mais je sens que les jambes avancent bon train ... Mes années loin des cimes semblent avoir été compensées par le sac de voyage ... Allégra, qui découvre un peu la randonnée en haute montagne a aussi le pas léger ... Il fait bon, bien que la buée accompagne nos paroles.
Il nous faut deux jours pour longer ce profond sillon torrentiel et remonter les 2400 m qui nous mènent à Kyanjin Gumba. Nous sommes alors à 3870 m d'altitude et le ciel est d'un profond bleu foncé. On s'installe dans un petit refuge de 4 chambres pour 3 nuits, le temps de profiter du paysage enneigé qui nous entoure.
Le Langtang Lirung (7227 m) domine le petit village rural envahit d'hébergements touristiques. Ça casse un peu la magie, mais la fromagerie voisine nous console : "Allez mettez nous en 1 kg !" ... Le fromage de yak, ne vaut pas celui des Bornes de Haute Savoie, mais son petit goût fruité donne bien du plaisir !
On s'enfonce encore un peu dans la vallée pour profiter de quelques autres sommets enneigés, mais ce qui nous préoccupe surtout c'est le col de la Kangja (5106 m) que nous espérons passer pour rejoindre le sentier de Helambu qui doit nous conduire jusqu'à Katmandou. L'un nous dit qu'il est trop enneigé, l'autre que non ... "Mais avez vous du matos ?" Des cordes semblent nécessaires. Pourtant la carte et les conseils que nous avons glanés à Katmandou nous disent que le passage est sans difficultés. Que faire ???
Finalement nous optons pour une journée de reconnaissance, sans nos gros sacs (Pourtant réduits à 10 et 12 kg environ. Oui encore une douzaine pour moi car le passage du col n'offre pas d'hébergement. La tente nous accompagne donc ... Mais finalement pour rien.). Rapidement on se perd ce matin là. Heureusement nous avions prévu et c'est aux premières lueurs du jour que nous avons quitté la chaleur du gîte. Après quelques errances, le sentier retrouvé nous conduit rapidement sur les pentes du col. La neige est maintenant là. Le froid des hauteurs a maintenu légère cette première chute. Elle ne glisse pas. Nous continuons donc malgré une pente plus forte qui me fait un peu hésiter ... La montée est toujours facile. Je pense alors constamment à la descente. Me demandant à chaque pas si celle ci est sans risque ... Puis la confiance revient avec un adoucissement de la pente. A 4800 environ nous abordons le replat qui ouvre au col. Nous n'avons pas avancé aussi vite que prévu. Nous savons que les nuages reconquissent la vallée vers 15H et il est déjà 11H. On avance pourtant encore un peu. Avec la vue qui s'ouvre sur le col on estime qu'il nous faut encore plus d'une heure pour y arriver. Alors nous sommes au "High camp" (4900 m), dernier espace de bivouac avant le col. Il conclut notre ascension. Nous ne franchirons pas le col de la Kangja (Mais le Mont Blanc est vaincu !).
Sur un rocher ensoleillé on mange nos galettes de pain tibetain et le fromage de yak. Une barre céréales et c'est encore quelques pas ... On a du mal à se résigner à descendre, mais un nuage voile le soleil ... Si si, il est bien temps.
On a pas vu l'autre versant du col. Si, y monter, on sait que c'est à notre portée, il reste un doute sur son franchissement. Mais ce soir nous sommes ravis de la journée et finalement on se dit que ce n'est pas grave. Dans tous les cas nous devions aller dans une impasse pour ne pas manquer de visiter les lacs de Gosain Kund. Le demi tour est donc ici et nous rejoindrons les lacs en contournant le massif ... comme beaucoup.
Avec Kyanjin Kumba, nous quittons aussi le grand bleu céleste. Les nuages qui venaient nous couvrir en fin de journée sont bien installés au fond de la vallée. Et malheureusement ils ne nous quitterons plus jusqu'à notre retour à Katmandou.
Les paysages s'adoucissent, les cultures reprennent le pas sur la roche. Notre septième nuit nous la passons chez l'habitant, dans le village de Thulo Syaphru. Une petite famille avec qui les premiers contacts sont assez froid : "Bon on est là on reste, mais ...". Puis finalement, à l'heure du souper, avec la dame qui a posé son métier à tisser, la conversation s'installe avec nous autour du petit poêle. Elle nous prépare notre repas en direct, invitant Allégra à faire son second "Momo" (Gros ravioli garnis de légumes au curry et pour cette fois frits.).
Une nouvelle fois nous avons évité l'accueil surpeuplé et d'ambiance un peu trop attendue (Sauf esclandres étasunienne ou russe ... Tient finalement dans l'excès festif ces ennemis se ressemblent !) des hôtels touristiques.
On remonte maintenant en direction des lacs de Gosain Kund. Logiquement, l'altitude retrouvée nous fait franchir le couvert nuageux. Pas pour longtemps !
Et nous entamons la succession des 3 nuits les plus froides de la Caval. On grelotte. Même moi que certains d'entre vous connaissent peu frileux je commence à envier la plaine. Faut dire que le réconfort des refuges n'y est pas. De notre chambre je vois ici le jour au travers du mur de pierre pourtant doublé de bois et là les courants d'airs chatouillent nous joues tout au long de la nuit ... Le poêle chauffe peu de temps et si c'est dommage pour nous c'est tant mieux pour les arbres qui souffrent des frissons des touristes ... La hache opère à vif !
[ L'echo-logique : Encore un écho vert pour dénoncer ce bivouac de je ne sais quel tour opérateur, qui pour réchauffer ses heureux contractants envoie l'ensemble de ses porteurs à la collecte de bois pour le feu de la honte (Je ne peux dire de joie.) ... Arbustes et branches d'arbres y succombent ... Que les locaux se chauffent au bois, on ne saurait leur en porter grief, mais si la déforestation s'étend au tourisme, alors non ! Ils sont heureux ceux ci à profiter du beau cadre naturel de la montagne, mais à plus de 3000 m la végétation peine à pousser alors laissez la tranquille. Alors vite sous la couette et prenez un porteur de plus pour emmener avec vous un peu de gaz ... Et ça fera un emploi de plus pour ce pays dont 25% des gens vivent en dessous du dit "seuil de pauvreté". ]
Un nouveau levé au aurore aujourd'hui. C'est le temps nécessaire pour franchir le passe, à 4165 m, avant les nuages qui remontent déjà de la vallée. Les lacs de Gosain Kund se dégagent alors à nous, sombres malgré le ciel clair. La journée de marche est petite car nous voulons avoir le temps de tourner un peu autour de ces lacs où un jeune couple russe se baigne !!! Non, pour nous il fait trop froid pour renouveler l'experience de Fitzroy et du Torres del Paine (Cf article du moment.).
Allez encore le col de Laurebine à 4610 m et c'est sûr nous redescendons.
Le coteau qui ramène vers des températures plus clémentes est couvert de bambous. Alors bien évidement on s'excite d'une rencontre avec un petit panda (ou Panda roux - Plus sur l'animal ici.) qui habite le parc (Tout comme l'once (Panthère des neiges) mais bien trop rare pour espérer n'apercevoir qu'une modeste empreinte.). Par deux fois nous voyons l'inconfondable trace de pattes de ce plantigrade ... Point de petit museau et de grandes oreilles de cette peluche vivante, mais d'autres nous consolent ...
La descente continue ...
Un nouvel arrêt chez l'habitant. Toujours aussi charmant. Encore une fois le confort des gîtes touristiques n'y est pas mais quel charme dans ces soupers autour du poêle. Et pour couronner le tout, notre hôte est gastronome ... Certainement notre meilleur dal bhat. Quoique la soupe de lentille où l'on reconnaît le parfum du lard au "moonlight guest house" hum !!! Heureusement il fait encore bien frais la nuit. Suffisamment pour que Allégra et moi nous restions tout deux dans un lit de 70 cm de large toute la nuit. Le soir, le lit de Allégra ayant cassé en voulant le rapprocher du mien. Chaleur humaine oblige ! Bien que les deux pieds, calés au mur, tenaient de nouveau le lit à l'horizontal, Allégra ne voudra s'y coucher ...
Dernière nuit. Nous sommes maintenant bien sortis du parc du Langtang, mais c'est celui de Shivapuri qui arrête notre marche au village de Chisapani. Ici, que des immondes hôtels touristiques. Alors ma fois, nous en choisissons un. Moche, malodorant, froid, sans considération pour le touriste ... (Finalement, je retire lorsque je disais plus haut que chez l'habitant nous n'avions pas le confort des hôtels !!!) mais où nous retrouvons un couple de luxembourgeois qui ont partagé un brin de sentier avec nous. La discussion est sympathique et fait quelques peu oublier l'inconfort et le fade repas qui nous est servi. Merci pour cela Harry et Myriam et peut être au plaisir d'une nouvelle rencontre en Haute Savoie, puisque vous en êtes fidèles !
Le parc de Shivapuri est un bel ensemble forestier. Les orchidées s'y épanouissent et le hameau de Mulkarka un régal d'architecture rurale ... On aimerait presque s'y installer, mais ses airs d'Ardèche, nous conforte en notre projet de retour ...
Est-il la peine que je parle du retour à Katmandou... La poussière, le retour du bruit et d'une circulation grouillante semblent peu digne d'intêrets ... Le contraste est grand avec ces deux semaines et la magie du premier Katmandou semble bien loin ...
Et le rêve continue ...